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+ 5,1 % d’agents contractuels... Analyse

+ 5,1 % d’agents contractuels

Le nombre de contractuels dans l’ensemble de la fonction publique a augmenté de 54 300 agents, soit une hausse de 5,1 %. Ces données sont contenues dans la dernière édition du rapport annuel sur l’état de la fonction publique, qui sera présenté aux représentants du personnel et des employeurs le 19 octobre. La hausse est particulièrement marquée dans la fonction publique d’État (+ 6,5 %, contre + 4,2 % dans la territoriale et + 3,7 % dans l’hospitalière). Plus d’un agent public sur 5 est un contractuel.

Info Acteurs Publics du 13 octobre 2021

Contractuels.
Des agents presque comme les autres... mais sans avenir professionnel dans nos services. Des kleenex jetables. Comme les missions et l’intérêt général ?
Alors que les contractuels occupent presque 19 % des effectifs de la fonction publique de l’État, la loi dite de transformation de la fonction publique de 2019 (la même qui supprime les commissions administratives paritaires de mutation et de promotion pour tous les agents ainsi que les CHSCT) vient faciliter le recrutement de
précaires en lieu et place de fonctionnaires.
Pourquoi donc ce besoin irrépressible de faire augmenter la précarité dans nos services ?
Pour les services de la DGFIP - jusqu’alors relativement épargnés par le recours à une main d’oeuvre temporaire sur des emplois permanents - l’argument d’une difficulté à pourvoir des postes vacants dont la technicité ou les pré-requis nécessaires « obligeraient » à un appel d’offre pour recruter « l’oiseau rare » ne tient pas. Ou alors à la marge, par exemple sur des fonctions informatiques.
D’abord parce que la multiplicité des missions oblige à une formation professionnelle de fond à l’Enfip pour les agents des Finances publiques, ensuite parce que la mobilité professionnelle (mutation, changement d’affectation) est accompagnée d’une offre de formation adaptée.
Dans les faits, la Dgfip décline tout simplement un principe idéologique néo-libéral : celui selon lequel les salariés en situation précaire et en concurrence entre-eux seraient davantage productifs que les (forcément) « feignasses » sous statut. Vieux principe libéral qui veut que les droits sociaux des salariés soient un obstacle à la productivité… et l’absence de garanties conjuguée à la subordination du contrat de travail permet l’autoritarisme et l’arbitraire… en pressant le citron.
Pour le contractuel, c’est très clair : il n’y a aucune perspective d’embauche statutaire à l’issue du contrat à durée déterminée (ou de projet) de quelques mois à trois ans. Le contrat de projet peut même être interrompu à l’initiative de l’administration si les objectifs sont atteints avant le terme du contrat ! Paradoxe de celle ou celui qui va se décarcasser pour faire le job et se voir potentiellement jeté plus tôt !
Plus prosaïquement, l’ultra-spécialisation et le néo-taylorisme dans l’organisation des missions - y compris bien sûr les centres de traitement délocalisés – ouvrent la voie à un travail à la tâche qui rend caduc la nécessaire formation initiale pour accomplir les missions.
Qui a parlé de mobilité quand le système de contractualisation justement empêche toute mobilité au salarié sous contrat et a contrario empêche un agent d’occuper ce poste par mutation, c’est-à-dire par mobilité choisie ?
Ce ne sera pas la faute du contractuel : c’est le système qui veut ça.

Concernant les emplois de cadres supérieurs de direction, Afip et Agfip, là se joue un autre scénario.
Las ! Malgré le travail besogneux de la majorité d’entre eux non seulement à mettre en oeuvre les contre-réformes et à « proposer » - particulièrement à travers l’association professionnelle qui leur tient lieu de club de grenouillage- des reculs concernant les droits et garanties des agents (« les agents ont trop de liberté », « le CHSCT est un frein aux restructurations » etc.), voilà t’y pas que ces bonnes
gens se retrouvent mis en concurrence sur les postes décisionnaires avec des récipiendaires biberonnés au return on investment, à la rentabilité
financière ! Quelle ingratitude...
Pour consolation, ils pourront à leur tour « profiler » les postes à responsabilité des cadres subalternes au détriment des règles d’ancienneté et de grade.
À défaut de convertis, il faut mettre aux postes décisionnaires celles et ceux qui n’éprouveront aucun regret parce qu’ils n’ont pas la culture du service public et surtout... ils ne l’aiment pas.
Le retour sur investissement est en effet incompatible avec l’intérêt général. La logique de la loi de la transformation de la Fonction publique, c’est de transformer les fonctionnaires en agents du gouvernement et pour ce faire, le développement des emplois de direction discrétionnaires, contractuels et fonctionnels en lieu et place des emplois statutaires constitue une atteinte au principe d’indépendance du fonctionnaire. C’est un contournement du statut qui s’avère être un danger pour le service public.
Si l’égalité d’accès et de traitement de l’usager se voit désormais considérée comme un coût et non plus comme un principe fondateur, il en est de même pour les règles de gestion du personnel lesquelles doivent s’adapter à ce changement de paradigme.
Plus généralement, l’ouverture à la contractualisation sur des emplois permanents,
c’est comme la composition chimique des corps : si l’on retire ou ajoute un seul des
éléments constitutifs, on change la nature des corps.
Car ne nous y trompons pas ; le recours au contrat vient s’adosser à un ensemble de dispositifs dont l’objet est de faire basculer la fonction publique de carrière vers celle d’emploi et de permettre d’autres coupes budgétaires bien plus conséquentes.
La DDFiP 71 s’est résolue à recruter 16 contractuels, bénéficiaires de contrats de 3 ans renouvelables.
Les éléments de langage écrits par la DG sont les suivants : « On n’arrive plus à
recruter , le niveau de recrutement s’affaisse et la DGFIP n’est plus attractive ».
Pauvreté de l’argumentation qui tente de faire oublier que si le sujet de la gestion prévisionnelle des emplois vacants tombait au concours, aucun des décideurs de Bercy n’aurait la moyenne !
Dire que le « niveau baisse » quand le concours C correspond au brevet et le concours B au baccalauréat, c’est se ficher du monde au vu du parcours scolaire des lauréats !
Par contre pour que le niveau de diplôme requis justifie la faiblesse des salaires, là pas de soucis...
Voilà en boucle la rhétorique de la direction générale sur le recrutement de contractuels : les candidats au concours n’ont pas le niveau !
Rappelons ici ce que préconisait la Cour des Comptes dans son rapport mercenaire contre la Dgfip en 2017 : « l’exercice de compétences de proximité en matière de gestion des ressources humaines (recruter, évaluer, primer, sanctionner) ». « Recruter » en local, c’est embaucher des contractuels. Mais pour rendre cela possible, il fallait réunir au moins deux conditions ! La loi qui l’autorise (loi d’août 2019) et les vacances d’emplois qui facilitent le recours aux contractuels, c’est-à-dire des emplois non pourvus par concours tout en tenant compte du plafond (débile) d’emplois prévu par la Lolf. Sous recrutement par concours = recours aux contractuels. CQFD.
Ajoutez à cela les suppressions d’emplois et les départs en retraite (méritée) des boomeuses et boomers, « l’urgence » du comblement des emplois vacants pour assurer le fonctionnement des services vient supplanter le recrutement
statutaire.
Dans le même temps, la DGFIP supprime les organismes paritaires des mutations (rôle de contrôle des élus du personnel) et des agents (y compris prioritaires) ne sont pas mutés car la DG fait peser les vacances d’emplois sur les directions
locales en répartissant la pénurie. Nous sommes entre l’incurie sur la gestion prévisionnelle des emplois et les artifices pour justifier les recours aux contrats précaires.
Quant à la tentative de promotion de la rupture conventionnelle… malgré le peu d’engouement suscité, comment ne pas y voir une niche pour le
recrutement de contractuels ?
Ainsi l’administration tentera d’apparaître comme un sauveur en proposant partout où il y a des vacances d’emplois, de renforcer certains services par des contractuels… et de sous- entendre que ce n’est que le début.
Et puis dans le cadre des restructurations et des fermetures, c’est aussi plus pratique d’avoir des contractuels que des agents sous statut.
Ceci étant dit, c’est bien la stratégie de la DG d’avoir des salariés à disposition sans
les mêmes garanties que les agents sous statut.
La CGT Finances publiques 71 entend être aussi l’organisation qui interviendra pour défendre les intérêts moraux et matériels des contractuels, comme elle l’a toujours fait pour les agents contractuels de droit public (agents Berkani) et pour l’ensemble des salariés (nettoyage, restauration) qui travaillent dans les locaux de la DDFIP 71.

Article repris et adapté du Lou Gabian, le journal de la CGT Finances Publiques 13

Article publié le 21 octobre 2021.


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